Une femme, un calame, un peuple : L’école itinérante de Nana Asma’u du Nigéria.

Une érudite au service du savoir et de la Foi.
Nana Asma’u (qu’Allah lui fasse miséricorde) est la fille du savant réformateur Shehu Ousman dan Fodio, fondateur du califat de Sokoto au Nigéria.
Princesse peule devenue poétesse, enseignante et érudite, elle a initié un vaste système d’éducation pour les femmes de sa région et a écrit de nombreux ouvrages littéraires et religieux. Élevée dans une famille lettrée, elle reçut une solide formation islamique.
Pour son père et ses mentors, « apprendre sans enseigner n’aurait pas de sens », ce qui explique l’importance qu’elle a accordée tout au long de sa vie à l’instruction, en particulier celle des femmes. Elle illustra pleinement l’adage que « en Islam, la quête du savoir est un devoir religieux », considérant l’éducation comme un acte spirituel et un moyen d’émancipation. Polyglotte (arabe, peul, haoussa, tamasheq), passionnée de poésie, Nana Asma’u a rédigé environ soixante ouvrages en quarante ans – des traités d’histoire, de droit, de théologie, de politique, etc. – qui sont encore étudiés de nos jours.
Son œuvre prolifique, ancrée dans le Qur’an et la Sunnah, visait à transmettre le savoir islamique aux générations futures et à rappeler le rôle actif que les femmes peuvent jouer dans la communauté musulmane.
La Da’wa itinérante : le réseau des jajis.
Après les campagnes d’expansion du territoire menées par son père, Nana Asma’u devint responsable de l’éducation des femmes au sein du califat. Confrontée à la conversion massive de populations et à la dispersion des communautés rurales, elle eut l’idée novatrice de mettre en place une Dawah itinérante. Vers 1830, elle forma un collectif de femmes enseignantes appelées les jajis, qu’elle envoya à travers le pays pour éduquer les villageoises. Ces enseignantes itinérantes, souvent par binômes mêlant jeunesse et expérience, instruisaient les femmes dans des maisons d’étude en s’appuyant sur les poèmes pédagogiques composés par Nana Asma’u – des vers mnémotechniques facilitant l’apprentissage des bases de l’islam.
Consciente de l’importance des symboles, Nana Asma’u remit à chaque jaji un chapeau traditionnel orné d’un turban rouge, rappelant celui des anciennes prêtresses locales, afin que ces prédicatrices soient immédiatement reconnues et respectées par les villageois. Elle nomma ce mouvement éducatif Yan Taru (qui signifie « se rassembler »), pour souligner la sororité dans la quête du savoir.
L’objectif affiché était clair : rappeler que l’éducation des femmes est un droit garanti par l’islam, et non une faveur à quémander. Avec l’aide de ces jajis, des milliers de filles et de femmes ont pu accéder en quelques années à une connaissance religieuse solide, ancrée dans la Foi et les valeurs d’égalité et de justice de l’islam.
Héritage et inspiration spirituelle.
Nana Asma’u fut également conseillère politique auprès de son frère, le calife Mohammed Bello, et correspondit avec de nombreux savants de son époque, faisant entendre une voix féminine respectée dans la sphère publique. Son héritage perdure jusqu’à aujourd’hui : au nord du Nigéria, de nombreuses écoles, associations féminines et institutions portent son nom en hommage à son impact. Elle fait l’objet d’études académiques et inspire les réflexions contemporaines sur la place des femmes en Islam.
Figure emblématique de l’érudition féminine musulmane en Afrique, Nana Asma’u demeure un exemple lumineux pour les croyant·e·s. Sa vie entière est décrite comme une ode au savoir partagé, ayant pour finalité la paix, la justice, l’égalité et la fraternité spirituelle au sein de la umma. Puissent les musulmans et musulmanes d’aujourd’hui s’inspirer de son dévouement à la ‘ilm (connaissance) et à la Da’wa (transmission du message), dans l’espoir de voir se perpétuer son œuvre bénie – Allâh yarhamuhâ, qu’Allah lui fasse miséricorde.
Sources : Nana Asma’u, princesse érudite du Sokoto ; Attika Trabelsi, Ode au savoir partagé ; Patricia Mons, Nana Asma’u – Un idéal féminin ; Al-Madina Institute.
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